Cheval et Homéopahtie Vétérinaire

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La thérapeutique homéopathique bénéficie d’un préjugé favorable auprès des éleveurs et des propriétaires de chevaux. Pourtant, soigner ou faire soigner son cheval en homéopathie est compliqué, faute très souvent de praticien compétent ou de méthode fiable pour le cavalier. La facilité d’emploi, (les granules sont bien acceptées par le cheval) l’innocuité , (si on se trompe de remède, on n’a pas en général d’effets secondaires), le prix très faible des remèdes font que nombre de cavaliers ont des tubes à portée de main et tentent un traitement . Pour beaucoup, l’homéopathie reste une façon douce de soigner les petites blessures (Calendula, Arnica), un coup de froid, un début de bronchite ; dés que le tableau s’assombrit (fièvre persistante, anorexie, atteinte de l’état général )l’allopathie reprend ses droits avec ses traitements à base d’antibiotiques et d’anti-inflammatoires .
A l’homéopathie, les petits soins, à l’allopathie les choses sérieuses.
Nous allons tenter de démontrer que ce schéma ne correspond pas à la réalité :
Deux mots d’histoire : Samuel Hahnemann, médecin allemand, publie en 1796, un essai « sur un nouveau principe pour découvrir les vertus curatives des substances médicinales »  C’est la naissance de l’homéopathie :
homeois = semblable, pathos = mal .
Hahnemann expérimente sur lui-même ou ses amis en bonne santé, un certain nombre de produits toxiques (aconit, belladone, arsenic), en prenant soin de les diluer afin de ne pas s’empoisonner complètement. Il note scrupuleusement les effets déclenchés sur l’homme en bonne santé. Il établit alors un parallèle entre les troubles observés, et certains symptômes chez les malades, il remet à jour le principe de similitude que les semblables guérissent les semblables : énoncé par Hippocrate, (400ans avant JC,) repris par Paracelse (XVIème siècle). Dans le même temps, il réalise que les préparations qui ont été agitées pendant ses déplacements à cheval dans ses sacoches, sont plus actives. Il en déduit l’idée de la dynamisation.
Similitude, dilution, dynamisation sont les trois clés de cette nouvelle thérapie.
"Homéopathie à la ferme"*

Une observation : le 31 mars 1999, Monsieur T.. éleveur nous demande d’examiner et de traiter son cheval Sultan, hongre anglo-arabe âgé de 9 ans. Le cheval tousse au travail et a passé un mauvais hiver, il n’a ni la forme, ni le moral.
Le propriétaire déclare : « j’ai remarqué qu’il est allergique à la poussière d’une façon générale, et que tout s’aggrave par temps humide. Il a passé l’été dehors, il y a eu moins de problème, mais il est très sensible aux piqûres d’insectes. Il craint le froid et n’aime pas la pluie. Cet automne, les crises se sont succédées. La poussière dans la carrière, le foin un peu moisi ou très sec déclenchent des quintes de toux tenaces. Quand il tousse, tout le corps est secoué, il est très mal, il racle de la gorge et finit par expulser des glaires ; beaucoup de salive coule de sa bouche , un peu de liquide sort du nez, il arrache les rênes, il tousse en écartant les lèvres, il suffoque . »
Question : «comment est-il dans sa tête, comment est son moral ? »
« Il n’est pas très bien dans sa tête ; Il est très nerveux. En concours il est sur l’œil, depuis l’année dernière, il ne veut plus sauter, il a peut-être mal au dos, le vent l’aggrave, vent du midi, et même vent du nord, il a peur pour un rien, il n’est pas agressif, il est même très doux, mais il a des réactions bizarres, il n’aime pas être caressé. Un cheval a reculé sur lui et il a tapé immédiatement. Il a un poney avec lui, c’est indispensable car il ne veut pas rester seul. »
Les symptômes retenus sont :
- aversion à être touché
- peur, effrayé pour des broutilles
- secoué par la toux : toux torturante, suffocante
Traitement :
KALIUM CARBONICUM 9CH 3 granules une fois par jour pendant 3 jours.
La toux cesse dès le troisième jour, quelques prises supplémentaires en dilution 15 et 30 CH seront nécessaires pour conduire le cheval à la guérison.
Comment sommes nous arrivés au remède ?
Première étape : l’examen du cheval, rien de particuliers : auscultation pulmonaire normale à part quelques râles bronchiques, dyspnée au trot très accentuée en montée ; il s’agit d’une bronchite chronique, évoluant vers de l’emphysème pulmonaire.
Deuxième étape : l’écoute du propriétaire : c’est lui qui a les clés de la situation parce qu’il connaît son cheval, qu’il l’observe depuis des années (voir l’ouvrage : Homéopathie à la ferme)
Troisième étape : sélection des symptômes caractéristiques inusités, c’est-à-dire qui appartiennent au cheval en dehors de toutes références à la maladie. Dans ce cas nous avons privilégié trois symptômes : deux symptômes mentaux, un symptôme physique.
Ces symptômes se trouvent tous les trois dans un gros livre intitulé : Répertoire de la matière médicale homéopathique : cet ouvrage contient la majorité de symptômes provoqués et guéris par les remèdes. Il est divisé en plus de trente sections. Dans la section psychisme, nous trouvons les deux symptômes retenus : aversion à être touché, effrayé pour des broutilles, dans la section toux, se trouvent les modalités de cette toux : toux suffocante qui secoue tout le corps. 4 ou 5 remèdes se retrouvent cités dans les trois rubriques.
Nous ouvrons un deuxième livre intitulé Matière médicale qui contient l’étude détaillée de chaque remède. Nous constatons que Kalium Carbonicum apparaît comme le remède le plus convenable ; Kalium Carbonicum a amélioré le physique et le psychisme. Un remède qui n’améliorerait que le physique serait un remède incomplet, et même inadapté au cas considéré dans la mesure où les accès de toux pourraient s’espacer mais la maladie, le mal, réapparaître quelques semaines plus tard sous la forme d’une bronchopneumonie ou d’une crise d’emphysème aigu ; Nous touchons là un point fondamental de l’homéopathie : le malade est transformé en profondeur.
Il n’existe pas une autre médecine capable d’opérer une telle transformation.
Les chevaux sont très proches des êtres humains. Les cavaliers connaissent les réactions de leurs chevaux, leurs manies , leurs peurs, leur gout, leurs aversions, leurs habitudes. A partir de tout cet acquis le duo éleveur/ praticien a une chance d’aboutir au remède approprié appelé similimum, c’est- à -dire le remède le plus convenable, celui qui fera disparaître les troubles en douceur et amènera le sujet vers la guérison définitive sans rechute.
J’écris bien le remède unique car Hahnemann et ses collaborateurs nous ont légué toute une série de minutieuses observations à partir d’expérimentations effectuées sur l’homme sain en utilisant un seul corps d’origine végétale, minérale ou animale. Il ne leur est jamais venu à l’esprit d’expérimenter deux ou trois produits en même temps, ils n’ont jamais testé, par exemple, l’arsenic, le mercure, l’anémone des près (pulsatilla ) et un venin de serpent (lachesis ) ensemble, pour la bonne raison qu’ils auraient été incapable d’écrire une seule ligne concernant l’action de ces remèdes. Lequel a donné les vomissements ? Lequel a donné les troubles respiratoires ou l’état d’anxiété ? donc quand il s’agit de donner un remède pour guérir, en donner trois ou quatre ensemble ou à quelques heures ou quelques jours d’intervalles revient à dénaturer complètement le travail que les précurseurs nous ont légué.
« Au cours de tout traitement visant à la guérison, il n’est dans aucun cas nécessaire et de ce fait il est même inadmissible d’utiliser chez un malade plus d’une seule substance médicinale à la fois »Samuel Hahnemann –L’Organon, de l’Art de guérir –
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Deuxième exemple : Tempête : hongre croisé Connemara âgé de 18 ans .
Il est dans un centre équestre depuis deux ans – motif de la consultation : emphysème pulmonaire avec crises de plus en plus rapprochées.
Le cheval aime aller en balade, mais a de la peine à suivre les autres ; il a reçu plusieurs traitements homéopathiques prescrits par un confrère chevronné. Beaucoup de remèdes ont été essayés, les uns après les autres sans amélioration notable. Les corticoïdes et les anti-biotiques sont utilisés en cas de crise aigue. Le moniteur qui me reçoit est sceptique.
Dans ces conditions, je comprends qu’il est vain pour moi de chercher une fois encore un autre remède. Nous sommes dans le cas où les remèdes qui semblent adaptés n’agissent pas. L’expérience nous a appris que les nosodes sont alors d’un grand secours.
Les nosodes ou biothérapique sont des remèdes obtenus à partir de cultures microbiennes de virus, de sécrétions ou d’excrétions pathologiques .
Tuberculinum , par exemple est préparé à partir de la tuberculine produite par le bacille tuberculeux ; Vaccinotoxinum est obtenu par dilution hahnemannienne du vaccin anti-variolique, Influensinum à partir du vaccin de la grippe etc..etc..
Les nosodes sont des remèdes homéopathiques à part entière, on les prescrit en fonction des symptômes exprimés par le malade. Dans ce cas là , l’auscultation pulmonaire confirme bien le diagnostic d’emphysème.
Je demande alors au propriétaire de me parler du cheval, de me raconter des anecdotes illustrant son caractère, sa façon de réagir vis à vis de ses compagnons de club, quand il est au repos, quand il travaille, de me parler des chose qu’il aime faire, de celles qu’il déteste, bref ; je m’assieds et j’écoute .
J’apprends que Tempête est avant tout facétieux, passionné et provocateur. En balade, il veut souvent être devant, non pas parce qu’il veut être chef, mais parce qu’il sait que ça énerve deux ou trois de ses compagnons.
« Un jour, je suis parti avec lui à la poste voisine distante de 7 kms, je suis descendu pour mettre  mettre les lettres dans la boîte et dire bonjour à un ami, j’ai lâché les rênes, Tempête s’est reculé de quelques mètres, je n’ai jamais pu le rattraper ; au moment où j’allais saisir les rênes, il reculait ou fuyait en tous sens, nous avons fait ainsi les 7 kms du retour, moi à pied, très contrarié, lui visiblement très satisfait de ce bon tour. Je ne lui ai pas crié après, parce qu’alors il se bloque, on ne peut rien en faire, il ne supporte pas le moindre reproche »
Question « comment réagit-il au bruit en général, à la musique en particulier ? »
Réponse : « quand j’écoute de la musique la fenêtre ouverte, souvent les chevaux sont en liberté dans la cour, il est le seul à venir à coté de la fenêtre, il peut rester là des heures, on dirait qu’il apprécie, que ça lui fait du bien »
Question : « dans quel état psychique et physique est-il arrivé au club ?
Réponse : « il était triste, il toussait déjà un peu surtout au trot et au début du travail, j’ai pensé que cela passerait tout seul »
« et aujourd’hui, il a toujours ce fond de tristesse ? »
« oui ,il est à part , mais aussi il a besoin des autres, il va les chercher, les provoquer, puis il s’en va »
Je sélectionne trois symptômes :
- absence de réactions aux remèdes apparemment bien indiqués
- hypersensibilité à la musique et à la réprimande
- désir de s’isoler et désir de compagnie
Après recherche dans le répertoire et la matière médicale, je prescris
Carcinosinum 10.000 K, 3 granules deux jours de suite et c’est tout ;
Ce nosode issu d’un prélèvement de tissu cancéreux ne se trouve pas en France ; la lettre K signifie dilution korsacovienne : Korsacof était un médecin russe contemporain d’Hahnemann qui a mis au point une autre façon de préparer les remèdes. Cela permet d’obtenir des dilutions beaucoup plus dynamisées que les centésimales hahnemanniennes. Le propriétaire a commandé le remède à Genève ; une troisième et dernière prise fût administrée au bout d’un mois ; le cheval allait déjà mieux, trois mois plus tard, il avait grossi de 30 kgs, ne toussait plus, son ancien propriétaire est passé devant son box sans le reconnaître, le cheval avait retrouvé non seulement sa joie de vivre, mais avait changé également de peau, son poil et même sa couleur étaient différents.
L’homéopathie peut transformer l’animal en profondeur écrivions-nous au début de cet article, c’est de ce degré de guérison dont nous voulions parler, pas seulement de la disparition de deux ou trois symptômes.
Alain Boutonnet
Vétérinaire
Bibliographie :
Dr Michel Zala : « Consulter un homéopathe, pourquoi ? comment ? »
Ed : Centre Liégeois d’homéopathie
Dr Philippe Labre : «Homéopathie vétérinaire chez les bovins ,ovins, caprins » Ed Femenvet

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